Si tu t'abonnes, tu reçois

Clandestine

la newsletter d'une sorcière un peu illuminée,

des infos sur mes ateliers & autres grimoires

et surtout plein de love

& d'envie de te mettre à écrire

En cliquant sur valider, j'accepte de recevoir sur cet email les actualités et offres personnalisées du site canardalorange.com. Je dispose d'un droit d'accès, rectification et suppression de mes données et peut me désinscrire à tout moment via les liens de désinscription en bas de l'email.
J'ai lu et j'accepte la politique de confidentialité du site.

En la forêt, l’Amazonie – Journal du futur

Les 3 premiers jours

« Écrire au présent, presque uniquement.

Parfois au passé, quand il sied.

Pour laisser le futur se dérouler sans entrave.

Ne jamais revenir en arrière, ni reprendre quoi que ce soit d’autre qu’une faute d’orthographe ou une tournure de phrase un peu bancale.

Ne rien retoucher à la lumière de ce que je saurai, après.

C’est le défi que je me lance.

 

Mardi 8 septembre 2020
Saint Adrien

Les bruits de la ville, au loin.
Le grincement de la fenêtre, il y a du vent aujourd’hui.
Le ciel, bleu acier.
Le soleil, encore de plomb. Et moi qui guette, en vain, la pluie, celle que tout le monde semble détester et que je vénère.

Anne, ma sœur Anne, ne vois-tu rien venir ?

Le temps comme figé et qui file à toute allure, les journées que je passe seule, divinement seule.
Avant leur retour.

Dans ce temps-là, je rêve et je me nourris.
Je me nourris de séries, de films, de livres et de podcasts.
Je rêve de forêt, de permaculture, de vieilles pierres et de bestioles.

Enfermée chez moi, dans mon appartement aux murs de toutes les couleurs, je me sens comme un chat dans une boite à chaussures. En sécurité, libre d’être qui je veux, de laisser mes pensées vagabonder.

Je voulais faire du sport, je n’ai pas fait de sport.
J’ai pris un bain à la place et, brutalement, l’envie d’écrire est revenue.
Elle se taisait depuis plusieurs mois, ne se réveillant d’un œil que pour quelques newsletters clandestines.

Et me voici, tapant sur mon clavier.

Juste un titre et une envie.
Un titre dont je ne sais pas vraiment ce qu’il veut dire, et peu importe.
Envie de sincérité, de simplicité créative et d’intégrité envers moi-même. D’expérimenter aussi.

Je pense au « Journal d’Anne Franck », j’espère ma destinée moins tragique, mais je la sens près de moi. Cette jeune fille qui posait les mots de sa vie, juste par amour de l’écriture, peut-être parce que ça lui faisait du bien. Jamais nous ne saurons.

Il y a, à Lyon, à côté du Tribunal, un arbre, un marronnier, avec une plaque commémorative. Cet arbre est issu d’une bouture réalisée à partir du marronnier qu’elle observait et aimait depuis la lucarne du grenier dans lequel elle se cachait.

Je lis la plaque à chaque fois que je passe et je pense à elle.

Anne, ma sœur Anne…

Comme elle, je ne sais ce que la vie me réserve.
Et je sens une gratitude pour ce que j’ai déjà reçu.

J’ai 47 ans, mais je veux écrire ce journal comme à l’orée de ma vie. Prête à l’accueillir toute. Le beau comme le moche, l’imprévisible comme l’évidence.

Au milieu de mes pensées prosaïques (aller à la pharmacie, penser à prendre mon masque (maintenant, dans les films, je trouve que les gens se touchent vraiment beaucoup ^^), vérifier mes mails, confirmer mes rendez-vous), comme une vague patiente et discrète, je rêve de forêt.

Ma forêt.

Pas au sens de la propriété, mais comme une bulle dans laquelle je me fondrais. Dans l’humidité de la terre et de l’humus, le grincement des arbres, le vol léger des papillons.

Être dans la forêt.
Être la forêt.

Tiens, et si, à la fin de ce journal, je créais un cabinet de curiosités. Regrouper ce qui m’inspire, ce que je vais découvrir tout au long des mois (Semaines ? Années ?) d’écriture à venir.

Oui, faisons ainsi.
Faisons ainsi.

 

Mercredi 9 septembre

Instant de grâce.
Double instant de grâce.

Je rentre de la médiathèque, où nous avons fait le plein d’inspiration.
Je lève les yeux des bacs de BD jeunesse, dans lesquels je ne farfouille jamais, d’habitude.
Et, en face de moi, « Le journal d’Anne Franck » adapté en bande dessinée.

Anne, ma sœur Anne, elle m’a bien vu venir…

Ce midi, mon compagnon visite une maison qui nous a tapé dans l’oeil depuis un moment. Une vieille ferme dans son jus, comme on dit.

Avec une forêt, des pierres, une source et des oies.
Tout est à faire, tant de travaux. Il y croit, je suis morte de trouille.

J’ai tiré les cartes une première fois, pour cette maison, et une autre, son exact contraire, moderne et piscinée.

La ferme et la sagesse sont apparues.

Je viens de tirer les cartes une nouvelle fois, uniquement pour celle-ci.

Les mêmes cartes.

Et la peur se transforme en excitation.
En peur de se la faire piquer sous le nez !

Je lui dis de faire une offre, il se marre, il hésite, il me dit qu’il va réfléchir.

J’espère qu’il va la faire, cette offre.
Notre maison, peut-être.

Ou juste une pierre sur notre chemin.
Affaire à suivre.

Ce matin, j’avais la tête remplie comme une citrouille. Mille envies, mille idées de mots à poser ici et, à chaque fois, me réfréner.
Garder le cap sur la spontanéité de ce que je vais écrire une fois assise devant mon ordinateur.
Pas de notes, pas de « à l’avance », pas de recyclage.

Longtemps, j’ai eu envie d’écrire mes « mémoires », mon passé.
Et je n’y arrivais jamais.
Étrange impression, à chaque essai, de passer à côté de l’essentiel.

De voir les scènes s’éloigner, devenir floues, lorsque j’essayais de les mettre en musique, alors que mes souvenirs me paraissaient presque réels.

D’être tiraillée entre mes ressentis et ceux des autres protagonistes. Entre les faits et ma perception, forcément singulière.

Je me bride, je me censure, je me pose trop de questions.

Étrangement, je trouve infiniment plus simple de m’écrire au présent plutôt qu’au passé. Comme si, au lieu de regarder le film, vous aviez directement accès au cerveau de la réalisatrice.

 

Jeudi 10 septembre
16h24

Je suis la conductrice d’une locomotive. Au loin, je vois les rails se séparer et la personne qui va activer l’aiguillage dans un sens, ou dans l’autre.

Et décider ainsi de mon destin.

Je n’ai rien d’autre à faire qu’attendre son geste. J’ai accompli tout ce que je pouvais, je m’en remets à l’incontrôlable.

Nous avons fait une offre.
NOUS AVONS FAIT UNE OFFRE !

Hier soir, fébrilement, nous avons imaginé les travaux, la disposition des pièces, le futur potager-jardin-forêt.

Mais là, nous ne savons pas encore.
Oui.
Non.

Je suis du genre à m’emballer, beaucoup, beaucoup.
C’est trop dur de garder un secret joyeux.
Quand j’ai appris mes grossesses, le soir même la terre entière était au courant.
De toute façon, il paraît que ça se lisait sur mon visage ^^.

On m’a souvent rétorqué que je devrais me réfréner « au cas où ».
Au cas où quoi ? Un échec, un deuil, une déception, pourquoi devrait-on les cacher ?

Je me suis toujours dit que si mon bébé ne vivait pas assez longtemps pour venir au monde, je voudrais pouvoir en parler.
J’ai du mal avec la culture du secret, souvent mal placé.

Je n’écoute plus les « tu devrais », mais une chose est sûre, je n’ai jamais regretté d’avoir trop parlé, ou trop tôt, ou avec trop d’enthousiasme.

Mais quand même, ça m’énerve, cette société qui­ bride tant les émotions.

Bon, respire, Morgane, respire.

Me voici donc dans l’attente.
Quel moment étrange, que je voulais partager avec vous pendant que je le vis et pas après, lorsque je saurai.

Car la saveur sera forcément différente.

Joie mêlée de peur.
Ou déception mêlée de détermination à reprendre le bâton de pélerine.

En fait, je sais que les deux me vont.
Je n’aurai pas de regret puisque la décision ne me revient pas.

Advienne que pourra.
Advienne que voudra. »

Pour lire la suite, au jour le jour (1 an d’écriture et 300 pages pour l’instant), tu peux acquérir « En la forêt, l’Amazonie » dans mon chaudron.

Partager cet article

Qu'en pensez-vous ?

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

4 commentaires
  • Sofia
    14 septembre 2020

    Joie de te lire ici…
    Joie de savoir que nous ne sommes pas seules avec l’auto-censure, les questionnements, les tergiversations. Nous sommes au moins 2, mais je nous sais beaucoup plus.
    Joie aussi de lire les dépassements, les émotions, l’instantané.
    J’espère que vous l’aurez, votre maison dans la forêt… et si ce n’est celle-là, ce sera une autre.
    Les cartes ont parlé.

  • Jennifer
    14 septembre 2020

    Mais c’est géniaaaaaaal pour la maison !!!!!!
    de vieilles pierres ?!
    potager jardin foret ?!
    j ai la chair de poule
    je suis super émue pour toi Morgane
    Bravo Bravo !
    Quel que soit l’issue de cette offre (moi aussi fatiguée de cette culture de l’étouffement et de la honte)
    Si c est pas celle ci ça sera une autre encore mieux Mais la locomotive est en marche !

    Et un immense bravo&merci pour ce projet d’écriture et de livre que je trépigne d’impatience de découvrir ! 🙂